L'excellent texte décrivant le prototype par Makestorming a inspiré cet article qui tente de le compléter, de l'anguler dans le domaine des mobilités. Vous avez dit "prototype" ?
- Le prototype pour retrouver le goût du ‘faire’,
- Un objet ‘non-fini’,
- Proto-what for ? : Créer un imaginaire commun et un engagement sensuel autour du projet, Faire naître un langage commun: ‘l’objet frontière’,
- Tester une hypothèse, un concept,
- Le prototype peut changer de forme ou de nature au cours d’un projet,
- Tous prototypistes ? proto-everything ?
Le prototype est l'externalité physique ou numérique d'un groupe qui lui permet de se voir lui-même fonctionner. En s'extériorisant, il lui offre ainsi un moyen au groupe de se "transcender". Il est la forêt qui pousse dans un monde où tout est fait pour entendre, agir en fonction de l'arbre qui tombe (vidéo L'arbre qui tombe fait plus de bruit que la forêt qui pousse). Ce prototype est donc incomplet, fragile, améliorable, à l'image du groupe d'humains le réalisant.
Par les actions nécessaires à sa mise en oeuvre et ses propriétés intrinsèques, le prototype conduit à l'holoptisme (lire les articles du blog liés) en permettant à chacun de s'ajuster individuellement tout en observant les conséquences sur le tout. Le prototype industriel est équivalent à la musique d'un orchestre ou le jeu au ballon d'une équipe de sport. Pour cela, les équipes s'entraînent pour produire une "oeuvre" qui n'est visible que dans l'action collective synchronisée devant un "autre" – un public, un utilisateur. Supprimer le ballon, le public, ou la musique et plus rien n'a lieu. En conséquence, la production du prototype induit un entraînement individuel spécifique pour cultiver ses talents, son individuation & un entraînement collectif pour faire ensemble, pour apporter ses compétences tout en amplifiant et catalysant les compétences d'autrui.
Dans le domaine des mobilités, le prototype se construit de plus en plus par l'usage, par la multitude des offres, par la complexité des évolutions de nos modes de vie et de travail. Nous passons de l'ingénieur des produits à l'entrepreneur des expériences. Le prototype sera "l'objet lien" de ce système complexe (lire l'article : Quel est l'objet lien de votre projet ?). En contact avec tous les acteurs dont les utilisateurs, avec toutes les phases de vie, le prototype sera en friction et ces frictions seront parties intégrantes du prototype. Le prototype devient un révélateur et un traceur des usages. Il s'en imprègne. Les itérations concernant les usages, les détournements, les incidents, les incompréhensions feront partie des nombreuses interactions avec le prototype. De ces échanges vers le prototype et entre les parties prenantes via le prototype, va se construire à travers les versions, un language commun, puis une culture.
Comme de plus en plus d'innovations dites sociales se développent, ouvrant de nouveaux types de prototype. Des collectifs plus ou moins outillés de numérique prototypent ainsi simultanément une finalité (pour résoudre un problème, par exemple "comment utiliser des légumes non commercialisables ?") et un processus permettant d'atteindre cette finalité (ici, en réalisant des soupes collectives dans l'espace public par une ambiance festive, le disco soupe). Le prototype (le toolkit) fusionne la culture, les moyens, la finalité et la communication.
Dès aujourd'hui, nous avons besoin d'artisan prototypiste, capable d'entraîner des collectifs, de (faire) matérialiser des concepts, de (faire) co-concevoir de nouveau service, de nouveau outil, de (faire) réaliser de nouveaux "objets liens" physiques et numériques, supports d'action pour de nouveaux industriels (lire un article sur Les nouveaux industriels). Dans cette quête, certains acteurs (lire les articles Le numérique change … et Ultra low cost + open source) sont structurés pour se penser à travers le prototype, la version béta …