Une enquête réalisée par l'Association de transport routier (RHA) a vu six répondants sur 10 (58,2%) indiqués avoir été victimes de vol de carburant au cours des 12 derniers mois. Ceci se retrouve dans une enquête en France (voir Ici). Il y a une corrélation entre prix du carburant à la pompe et vol de ce dernier. Une des conséquences sera donc un développement du vol de carburant conduisant à plusieurs solutions visant à le réduire : protection des véhicules (réservoir), protection des infrastructures de stockage des véhicules (parking sécurisé), protection des lieux de stockage et de livraison du carburant (station service, cuve)… ainsi qu'une augmentation de la surveillance interne à l'entreprise et externalisée par le biais des assurances.
Le carburant se caractérise au niveau économique comme le "centralisateur de taxe". Cette solution de type pollueur/payeur fonctionne bien jusqu'au moment où le prix de l'ensemble produit+taxe n'est plus tenable socialement notamment pour les salariés qui ne décident pas de l'endroit où ils habitent, de l'endroit où ils travaillent et de leurs horaires de travail. Ces derniers sont contraints en général d'utiliser un véhicule particulier, généralement d'occasion, fonctionnant avec une énergie fossile. Quand le prix de leur mobilité ne sera plus acceptable, ils arbitreront avec d'autres dépenses jusqu'au moment où cela ne sera plus possible … Le système de taxe sur la mobilité devra être capable de considérer beaucoup de paramètres, de s'ouvrir.
La fonction linéaire "plus je consomme de carburant, plus je paye de taxe" est mal adaptée aux chocs que nous allons vivre, elle est trop rigide. Le système manque de dégré de liberté alors que nous allons avoir besoin de souplesse. Même si le coût de la mobilité ne doit pas baisser, il faut maîtriser son augmentation pour tous, dans tous les territoires en fonction des usages réels, cela implique un système de taxe bien plus modulable.
Ainsi par exemple, la consommation du carburant d'un véhicule dépend du véhicule (technologies) et de son usage (conduite). Plus le conducteur s'écarte des principes d'une conduite économe, plus le véhicule consomme, mais l'écart n'est pas "suffisant" pour que le signal prix seul le fasse revenir à une conduite économe. Autrement dit, dans ce cas, la taxe n'est pas suffisante pour fournir le bon signal alors que les conséquences de cette conduite non économe sont partagées par la société : pollution locale, GES, sécurité. Il faudrait qu'en fonction de l'usage réel, la taxe soit modulée. Cela passe par un découplage de la taxe et du support physique (carburant), pour aller vers un support immatériel : la mobilité réelle. Cette solution ouvre également la possibilité de faire baisser le prix du carburant physique (puisque les taxes sont transférées) réduisant les risques de vol.
Imaginons maintenant que la taxe soit liée à plusieurs paramètres, aujourd'hui inclus à la consommation de carburant mais de façon trop rigide : distance parcourue, infrastructure choisie, style de conduite … mais avec la possibilité de paramétrer la taxe de façon non linéaire :
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distance : pas de taxe pour les premiers 100 km (mobilité de subsistance), puis taxe linéaire avec des taux variables en fonction de la distance : plus on roule, plus la taxe augmente (type impôt sur le revenu)…
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infrastructure : taxe variable en fonction de la voirie, de la congestion sur la voirie …
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style de conduite : augmentation très forte de la taxe selon le style de conduite non économe
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autre ???
Ainsi le signal prix fourni par la taxe sera extrêmement dépendant de la mobilité réelle et notamment de l'usage réel des véhicules.
Cette théorie est maintenant accessible grâce aux technologies de l'information. Certains pays, comme la Hollande, ont déjà étudié une possibilité équivalente – le roadpricing, sans réussir à obtenir une adhésion politique et sociale. La dématérialisation de la taxe sur un support non physique engendre des besoins énormes de données pour connaître la mobilité réelle, tout à fait gérable pour le numérique. Mais cela implique également des risques et/ou des craintes d'atteinte à la vie privée.
Nous avons donc le choix entre une surveillance nécessaire pour se protéger des vols de carburant rendus attirants par l'augmentation des prix du support physique (carburant) sans pouvoir faire baisser les taxes (principe pollueur/payeur très utile) ou une surveillance nécessaire pour ajuster, en fonction des mobilités réelles, le montant des taxes transférées sur un support immatériel donc non "volable".