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Onze catégories de mobilité en Ile de France, combien en France ?

par Gabriel PLASSAT

L’IAURIF vient de publier une étude sur la mobilité des franciliens actifs en fonction de leur emploi du temps et de leurs moyens de transport. L’exploitation des données est particulièrement intéressante et montre le chemin à suivre.

 

Elle a ainsi permis de dégager une typologie pertinente des actifs en onze catégories, au sein desquelles les habitudes de déplacements des individus sont les plus proches possibles et entre lesquelles, les distinctions sont aussi nettes que possible. Elle a ainsi permis de dégager une typologie pertinente des actifs en onze catégories, au sein desquelles les habitudes de déplacements des individus sont les plus proches possibles et entre lesquelles, les distinctions sont aussi nettes que possible.

 

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Une attention toute particulière mériterait d’être portée à deux de ces catégories. La première regroupe les actifs de banlieue dont le foyer comporte des enfants d’âge scolaire et pour lesquels l’activité d’accompagnement contribue fortement à accroître l’intensité et la pénibilité de leurs programmes quotidiens. Des aides à l’accompagnement « collectif » bien adaptées pourraient contribuer à réduire le volume de ces déplacements devenus, dans bien des cas, passablement contraignants. La seconde est formée des actifs de banlieue travaillant en horaires décalés, dans des endroits souvent mal desservis par les transports collectifs, qui devraient se voir proposer une alternative à la voiture particulière, surtout si les effectifs de cette catégorie venaient à se renforcer.

 

Par ailleurs, face aux évolutions majeures qu’a connu leur cadre de vie, une partie des actifs franciliens a été amenée à adapter ses stratégies de « chaînage » des déplacements pour organiser au mieux ses programmes d’activités quotidiens. Faciliter la réalisation de ces chaînages, par un urbanisme mieux adapté, sinon plus dense, et par une offre de transport mieux structurée serait de nature à rendre leur mobilité plus durable.

 

Mesurer les effets de telle ou telle politique de transports sur des groupes de personnes, dont la définition ne se limiterait pas à leur seule catégorie socioprofessionnelle, à leur âge, ou à leur niveau de revenu, pourrait représenter une avancée notable dans la conception des méthodes d’évaluation.

 

Ainsi il nous faut considérer une explosion des configurations, qui seront également variables en fonction des temporalités (je peux passer d’une catégorie à l’autre selon le jour de la semaine en fonction de la garde des enfants, de mon emploi…), conduisant à :

· Construire des systèmes de mobilité faisant appel à tous les modes simultanément pour être sûr d’avoir le plus souvent possible plusieurs solutions pour un même déplacement,

· Comprendre et anticiper les liens entre les principaux paramètres influençant nos mobilités, nécessitant de mettre en œuvre des remontées d’information de la demande en temps réel,

· Identifier, dans cette complexité, les plus faibles.

 

Pour exploiter les données, l’IAURIF utilise l’analyse des correspondances multiples. L’analyse des correspondances multiples (ACM) est utilisée ici afin de mettre en évidence ce qui rapproche ou, au contraire, distingue les comportements de mobilité, les choix modaux et les programmes d’activités des actifs se rendant quotidiennement à leur travail. Cette méthode permet de faire ressortir les liens multiples existant entre les nombreuses variables étudiées, alors que ce phénomène se trouvait passablement occulté dans l’analyse descriptive précédente. Seules seront retenus ici comme variables structurantes de l’analyse des correspondances multiples les critères du programme d’activités reconnus comme les plus pertinents à l’issue de l’analyse descriptive. Ces variables sont les suivantes :

· Le nombre d’activités ;

· Le nombre d’activités répétées ;

· Le nombre d’activités réalisées par période horaire : matin (6-10h), midi (10-16h), soir (16-22h) et nuit (22-6h) ;

· Le changement de département dans la journée ;

· La longueur moyenne de déplacement ;

· La distance, la durée et le type de liaison pour le trajet domicile-travail ;

· Le nombre d’activités pratiquées autour du lieu de travail et dans la commune de résidence ;

· Le fait de réaliser une chaîne de déplacements au cours du trajet aller ou retour entre le

· domicile et le lieu de travail ;

· Le fait de réaliser au moins une activité d’accompagnement, d’achats ou de spectacles et loisirs.

 

La méthode statistique utilisée ici permet d’illustrer graphiquement les principales oppositions et associations de caractères décrivant les programmes d’activités des actifs franciliens. Les axes factoriels figurant sur les représentations ci-après sont, en effet, des combinaisons des modalités des variables structurantes utilisées dans l’analyse. Chaque axe permet de représenter un ensemble d’associations et d’oppositions entre ces modalités. Certaines modalités seront ainsi corrélées positivement à un axe donné tandis que d’autres y seront corrélées négativement. L’analyse de ces corrélations permet ainsi d’interpréter la nature de ces axes.

 

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 Le premier axe explique, à lui seul, 10,3% de l’inertie. Au vu des variables explicatives les plus proches de l’axe, il peut être interprété comme reflétant l’opposition entre les programmes limités au seul travail et les programmes très « intenses » comportant un nombre élevé d’activités. Cette intensité du programme n’est d’ailleurs pas synonyme de diversité puisque le nombre d’activités répétées croît à mesure que le programme augmente en intensité : ainsi, plus le programme compte d’activités, plus l’individu est enclin à répéter certains types d’activités.

 

Cette analyse ouvre des possibilités en matière d’anticipation des mobilités. La connaissance « temps réel » des mobilités est accessible en utilisant nos objets nomades, et en protégeant correctement une partie des données. Certains citoyens pourraient en complément indiquer sur la base du volontariat le ou les modes qu’ils utilisent en temps réel. Couplés à toutes les données disponibles des transports en commun, véhicules partagés, météo et d’autres, nous sommes dès à présent capables d’établir des analyses encore plus globales en tenant compte des territoires.

 

Les objectifs sont multiples. Il s’agit dans un premier temps de comprendre, puis de prévoir, d’anticiper les futures demandes de transport, des différents modes en fonction des temporalités, de la météo, de la demande (prise en compte des effets rétroactifs). Il s’agit également d’identifier les plus vulnérables, les plus dépendants de l’automobile sans autre solution.

 

Les utilisations possibles sont immenses. Gestions anticipées des différents modes, organisation de certains transports collectifs uniquement en fonction de la demande, mise en œuvre de solution alternative automatique lors de la venue d’un cygne noir (grève, incidents, accidents, volcan …), mais également urbanisme, densification (voir exemple au Canada de réutilisation de garage et ici)…

 

Dans une société qui propose de plus en plus d’emploi à durée déterminée (voir statistiques Insee), nos systèmes de mobilité devront être hyperflexibles permettant simplement, sans charge mentale, de s’adapter à de multiples configurations de territoire, à un enchaînement de multiples activités, à des changements de structures familiales, à des changements de lieu d’habitation et de travail. J.Attali propose pour suivre cette tendance, de pouvoir acheter, comme les habitations de vacances en « time-sharing », une surface de X m² qui permettra d’habiter, en étant propriétaire, à Paris, puis à Bruxelles…

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