La récente étude (voir ici) mise en lumière par un article de la FING (voir des extraits ci dessous et ici) montre que nos comportements de mobilité sont relativement prévisibles.
“Nous sommes tous d’une manière ou d’une autre ennuyeux. Les individus spontanés sont largement absents de la population. Malgré de grandes différences dans les modèles de déplacements, nous avons trouvé que la plupart des gens sont également prévisibles”, reconnaît le professeur Barabasi, directeur du Centre de recherche sur les réseaux complexes au New Scientist. La prévisibilité, explique-t-il représente la probabilité que nous sachions prévoir les allées et venues d’un individu dans l’heure suivante, en se basant sur ses trajets précédents. Cette prévisibilité n’est pas liée à la distance parcourue : ceux qui font de grands voyages réguliers (les “jetsetters“) comme ceux qui restent à proximité de chez eux (les “homebodys“) sont également prévisibles, à quelque 93 %.
Alors qu’on pourrait penser qu’il est plus difficile de prédire le mouvement de ceux qui voyagent beaucoup, l’étude (.pdf) a montré le contraire : malgré notre hétérogénéité dans nos déplacements, nos schémas de déplacements sont réguliers, routiniers et tous également prévisibles. Autre surprise, cette régularité et cette prévisibilité ne diffèrent pas significativement selon les catégories sociales ou la densité démographique : quel que soit notre âge, notre sexe, notre groupe linguistique, que nous habitions à la campagne ou en ville, notre manière de bouger est pour tous également prévisible !
“Les individus suivent tous un motif simple, indépendamment du temps et de la distance qu’ils parcourent, et ils ont une forte tendance à retourner aux endroits qu’ils ont visités auparavant”, explique le spécialiste des réseaux. Pas sûr que la routine soit pour autant enracinée dans la nature humaine, comme le laisse penser le chercheur : notre mode de vie sédentarisé nous contraint par exemple à revenir toujours à nos domiciles… Mais c’est en tout cas un bon exemple des multiples modèles que l’étude des réseaux permet de mettre à jour, comme il le détail dans son livre à paraître, intitulé Bursts (Eclats, sous-titré “les modèles cachés derrière tout ce que nous faisons”, Amazon).
Ce comportement prévisible permet d’entrevoir une large gamme d’applications dans le domaine de la modélisation des phénomènes épidémiques, la gestion des ressources en télécommunications, l’urbanisme ou l’ingénierie des trafics. D’autant que de nombreux modèles utilisés jusqu’à présent sont construits sur l’hypothèse que les gens se comportent de façon aléatoire… Nathan Eagle, directeur du Laboratoire de l’ingénierie des systèmes sociaux au MIT, qui travaille sur des sujets similaires – et a montré notamment que 85 % du temps, nous sommes localisés dans des endroits où nous avons nos habitudes -, semble plus optimiste, puisqu’il insiste sur la longue traîne de nos comportements (.pdf) : 15 % de notre temps est dévolu à des localisations variées qui nous prennent moins d’un pourcent de notre temps.
Nos routines permettent d’envisager de concevoir les villes et bâtiments afin qu’ils s’adaptent à la façon dont les gens se comportent vraiment, plutôt que de la façon dont les planificateurs pensent qu’ils se comportent. “Le principal impact de cet enseignement va être sur le monde en développement, notamment pour les villes qui ne disposent pas de planification urbaine traditionnelle”, estime-t-il.
Pas si sûr. L’étude des mobilités permet par exemple de montrer que le succès du vélo à Copenhague n’est pas un hasard dû seulement à une politique volontariste de la ville… Mais qu’il est lié à une répartition très homogène des équipements. Comme le signalait un dossier du Groupe Chronos sur le sujet, pour augmenter la part modale du vélo dans les déplacements, la ville de Copenhague a affiché que d’ici 2015 (.pdf), 90 % des habitants devaient se trouver à 15 minutes maxi à pied ou à vélo d’un parc, d’une piscine ou d’un espace naturel… Et pour optimiser encore l’emplacement de ces équipements, il va être encore plus nécessaire de comprendre les parcours des habitants qui dorment dans leurs téléphones mobiles.
Il est intéressant de voir que nos mobilités, au global, pourraient se prévoir par le biais d'apprentissage mettant en oeuvre par exemple des réseaux de neurones. Pour devenir modélisable, il faudra également connaitre ou apprendre l'impact de paramètres extérieurs de type météo, accidents, grèves … Et ainsi quantifier la robustesse de nos systèmes. Alors nous pourrons gérer au mieux simultanément les offres et les demandes multimodales en temps réel, partager en conséquence les voiries, adapter les tarifs et les taxes.